Des enfants de 3-5 ans bousculés, malmenés à la cantine, enfermés dans une pièce obscure: c'est ce que les parents de la maternelle Rothschild de Nice ont découvert
"Ça crie à la cantine. Et on est puni." Tout a commencé par ces dires d'enfants âgés de 3 à 5 ans. Des paroles enfantines auxquelles les familles n'ont pas prêté attention.
Jusqu'à ce que l'un de ces petits bouts, plus loquace, crache le morceau. Pour raconter à ses parents ce qui se passe durant la pause-déjeuner à la maternelle Rothschild.
Dans les rangs des parents d'élèves de cette école sans histoire, située en face de l'hôpital Saint-Roch, la stupeur le dispute alors à l'inquiétude.
"Chacun d'entre nous a interrogé ses enfants. Tous nous ont raconté, avec leurs mots, les mêmes choses. Des enfants obligés de recracher les aliments pour avoir attaqué leur assiette sans attendre le top départ de la dame de la cantine. D'autres à qui on enlevait leur plat, parce qu'ils étaient trop lents à le finir, raconte une maman. Tout cela sur fond de cris, de propos déplacés. Alors, nous avons demandé aux parents de témoigner sur ces méthodes qui n'ont pas lieu d'être dans une école. A fortiori dans une maternelle."
"Allongés au sol, mains dans le dos"
Au total, une quinzaine d'attestations parentales ont été réunies.
Toutes mettant en cause une surveillante de cantine vacataire et deux ATSEM, personnel communal chargé de surveiller le temps de cantine, placé sous la responsabilité de la Ville.
"Une fois le dossier constitué, avec l'aval du directeur d'école, nous l'avons envoyé le 10 avril dernier sur le bureau du maire, Christian Estrosi, qui a été très réactif. Quinze jours après, la surveillante vacataire a été déplacée. Toutefois, les deux ATSEM sont toujours dans notre écolel."
Même si la Ville vient d'ouvrir une enquête sur cette affaire jugée très sensible.
Une présence qui ne rassure pas les parents. "Comment leur faire confiance après tout ça?"
"Fermez vos g..."
Ces dames de la cantine, comme on les appelle, ne se borneraient pas, selon eux, à bousculer les enfants trop lents à ingurgiter leur repas.
"Après le déjeuner, s'ouvre un temps récréatif. Quand certains de ces petits de 3-5 ans remuaient trop, elles les emmenaient dans la salle de gymnastique. Là, elles fermaient les volets, éteignaient les lumières. Dans cette pièce obscure, elles les obligeaient à s'allonger par terre, sans tapis, ni coussin. Pour rester, à même le sol, les yeux fermés et les mains derrière le dos. C'était leur méthode pour rétablir le calme."
Il y a aussi ces "fermez vos g..." entendus par ces parents lorsque le matin, ils emmenaient leurs enfants en classe.
"Comment s'étonner alors si certains refont pipi au lit ou pleurent de devoir rester à la cantine?", note Josiane (à sa demande, le prénom a été modifié).
Ici, les témoignages se succèdent. Tous sous couvert d'anonymat "parce que nous avons peur que l'on s'en prenne à nos enfants".
Un seul, Gérard Van Den Bulcke, acceptera de témoigner ouvertement "pour défendre les enfants et une certaine conception de l'école de la République".
Des faits qui durent depuis 2008?
Autre fait troublant: la durée de ces agissements. Parmi la quinzaine d'attestations recueillies, certaines émanent de parents, dont les enfants inscrits en élémentaire, étaient à la maternelle Rothschild, en 2008.
Pourquoi ces familles n'ont-elles pas réagi plus tôt? Pourquoi attendre six ans?
"Les enfants ne disent pas tout, surtout à cet âge-là, explique une maman. Il a fallu que des bruits circulent, que la parole se libère au sein même de l'école, que nous pressions nos enfants de questions, pour savoir... C'est comme cela que le silence a été brisé." (...)
Nicematin